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Rouler à 110 km/h sur les autoroutes ?

26/09/2023 - Lucas
5mn

Faut-il limiter la vitesse à 110 km/h sur les autoroutes ? Depuis de nombreuses années, cette question fait débat. Proposée en 2021 par la Convention citoyenne sur le climat, la mesure avait alors été écartée par le gouvernement. Mais fin 2022, l’idée est revenue sur le devant de la scène, à la faveur de deux actualités :

  • d’une part, la décision de l’État d’inciter les fonctionnaires à rouler à 110 km/h sur les autoroutes dans le cadre du plan de sobriété énergétique.
  • d’autre part, le lancement du mouvement 110.org par 9 personnalités s’engageant à respecter la vitesse maximale de 110 km/h sur les autoroutes.

Sous fond de crise écologique et énergétique, 68 % des Français semblent prêts à suivre le mouvement selon un sondage de l’IFOP. Il faut dire que l’économie de carburant observée grâce au passage de la vitesse de 130 à 110 km/h a de quoi séduire. Avec 16 à 20 % de consommation en moins, cette mesure est l’une des rares actions à avoir un effet immédiat à la fois sur les émissions de gaz à effet de serre et sur le portefeuille des ménages.

Pourquoi réduire la vitesse à 110 km/h sur les autoroutes ? Quels sont les atouts écologiques et économiques de cette mesure ? Et pourquoi continue-t-elle à faire polémique auprès de ses détracteurs ? L’Olivier revient sur le débat.

110 km/h sur les autoroutes : où en est-on aujourd’hui ?

Aujourd’hui, le Code de la route est clair : la vitesse maximum sur l’autoroute est de 130 km/h et de 110 km/h en cas de précipitations.

Cependant, on observe de nombreuses dérogations. Dans certains départements, la limitation à 110 km/h devient la règle et non plus l’exception sur certains tronçons autoroutiers. C’est le cas par exemple en Haute-Savoie où du 1er novembre au 31 mars, la vitesse sur autoroute est réduite à 110 km/h sur les autoroutes de la Vallée de l’Arve, en raison des problèmes de pollution. Dans tous les départements, des arrêtés préfectoraux limitent régulièrement la vitesse sur autoroute lors de pics de pollution.

Sur la route des vacances ou certains week-ends, il n’est pas rare non plus de voir des panneaux lumineux indiquer l’abaissement de la limite de vitesse à 110 km/h pour fluidifier le trafic.

Autour des agglomérations, la règle se généralise avec des sections à 110 km/h, voire à 90 km/h.

Réduire la vitesse sur autoroute, un gain écologique et économique immédiat

Les défenseurs de la mesure mettent en lumière les gains écologiques et économiques immédiats d’une réduction de 20 km/h de la vitesse sur les autoroutes. Les études observent qu’en moyenne, les
économies de carburant sont de l’ordre de 16 à 20 %.
Certaines expérimentations semblent montrer des gains moins élevés pour les voitures thermiques qu’électriques, mais les économies restent réelles.

16 à 20 % de consommation énergétique en moins, ce sont autant de rejets de carbone évités dans l’atmosphère. Or, la voiture particulière est source de 53 % des émissions de gaz à effet de serre du secteur des transports, ce qui représente 16 % du total des émissions totales de la France. En limitant sa vitesse sur autoroute, chaque automobiliste dispose d’un outil simple, concret et accessible pour réduire son empreinte carbone et participer à la lutte contre le changement climatique.

Olive sur la pizza : 16 à 20 % de consommation énergétique en moins, c’est aussi 16 à 20 % de carburant en moins à la pompe. En ces temps d’inflation où les prix des hydrocarbures flambent, réduire sa vitesse sur autoroute offre un vrai gain de pouvoir d’achat.

Limiter la vitesse à 110 km/h sur l’autoroute a un autre effet environnemental moins visible et immédiat : cette mesure incite les constructeurs automobiles à fabriquer des véhicules plus sobres. Avec une vitesse réduite, le besoin en voitures aux moteurs surpuissants diminue au profit de véhicules plus légers et compacts aux consommations énergétiques réduites.

Limitation à 110 km/h sur les autoroutes : le point de vue des opposants

Dès que l’idée de réduire la vitesse à limitation 110km/h sur les autoroutes revient dans l’actualité, le débat s’enflamme. À coups de pétitions et de communiqués de presse, les détracteurs se dressent vent debout pour dénoncer cette mesure « idéologique ».

Leur principal argument : la perte de temps sur les trajets quotidiens qui pénaliserait les ménages défavorisés habitant loin de leur lieu de travail. Il est vrai qu’en moyenne, rouler à limitation 110km/h au lieu de 130 km/h augmente le temps de trajet d’environ 8 à 9 minutes sur un trajet d’une centaine de kilomètres.

Les partisans de la mesure répondent par d’autres arguments. Selon eux, l’impact de la mesure sur les trajets quotidiens serait faible au vu de la modeste proportion de population utilisant l’autoroute au quotidien pour leurs déplacements personnels et professionnels. En 2019, les automobilistes parcouraient en effet en moyenne 13,3 kilomètres pour se rendre au travail. Et pour la plupart des conducteurs, les portions d’autoroutes empruntées près des agglomérations présentent déjà une vitesse maximale réduite, avec une circulation peu fluide.

Auto-Moto a réalisé un test en octobre 2022. Bien que défavorable à la réforme de la vitesse maximale sur autoroute, leur expérimentation prouve qu’en deçà de 200 kilomètres, abaisser la vitesse à limitation 110km/h se répercute peu sur le temps de parcours.

La sécurité, la vigilance

La question de la sécurité routière pose question. Pour la Ligue de défense des conducteurs, la sécurité routière serait « la grande perdante » d’une limitation de vitesse à limitation 110km/h sur les autoroutes. D’une part, parce qu’elle déplacerait le trafic sur les axes routiers secondaires plus accidentogènes suite à « la tentation justifiée de ne plus payer de péage pour rouler au ralenti ». D’autre part, parce qu’elle provoquerait des risques de somnolence. C’est ce point qui est mis en lumière par l’expérimentation d’Auto-Moto où les automobilistes relèvent une baisse de leur vigilance. Reste à prouver que rouler à 130 km/h avec le régulateur de vitesse sur une autoroute ne créé pas le même sentiment de monotonie, avec la même perte d’attention ? Dans tous les cas, un rapport de 2018 du Ministère de la Transition écologique et solidaire semble prouver au contraire que l’impact de l’abaissement de la vitesse serait positif sur le plan de l’accidentalité…

En conclusion sur la limitation à 110 km/h

Les agents publics sont-ils les prémices d’un élargissement de l’obligation de rouler à une limitation 110km sur autoroute ? Les défenseurs de la mesure l’espèrent pour le bien de la planète et l’intérêt général. Les détracteurs le craignent pour les impacts négatifs sur le quotidien et la restriction de la liberté individuelle. Le débat reste aujourd’hui entier. En attendant qu’il soit un jour tranché, chacun a le choix de rouler, ou non, à 110 km/h sur l’autoroute.